La communauté de la Maison D'Accueil de Ouagadougou (de gauche à droite: Père Joseph Clochard, Staigaire Joseph Souverain et Père Remmy Kambole) |
Mes confrères de la communauté de la Maison d’Accueil de Ouagadougou, la communauté de notre frère Dariusz, m’ont confié la charge de donner un bref témoignage sur la vie de notre confrère, qui vient de nous quitter.
Personnellement, j’ai connu Dariusz (appelé familièrement Darek) quand il était aux études au PISAI à Rome, et j’ai passé toute une année avec lui. J'ai pu apprécier son opiniâtreté dans l’étude de l’arabe. Jour et nuit il travaillait les bases de la grammaire arabe.
Quelle image gardons-nous de notre confrère Darek ?
Un grand homme, déjà en taille ! 1m 90 ! On l’appelait Diallo (et lui-même se disait Silmiga ) ou le mercenaire pour blaguer! Un grand homme aussi par ses qualités humaines : intellectuelles,physiques et spirituelles. Une capacité de travail un peu hors du commun, puisqu’il était à la fois chargé de l’Administration du Centre Pélican ; mais aussi de seconder l’économe provincial pour la comptabilité et la gestion de la Province. Il aidait aussi l’accueil pour l’approvisionnement de l’économat et enfin, il se chargeait de tout ce qui se rapportait aux voyages : aéroport, visas, achat des billets, etc.
Avant l’arrivée du Père Remmy Kambole, Darek était le seul à assurer ces multiples tâches sans compter la préparation et la célébration des messes quotidiennes de la communauté. Sa force était dans son organisation, et on comprend que devant ses multiples tâches, il pouvait parfois refuser un imprévu…
C’était un homme d’une grande culture, il connaissait l’arabe et s’était mis au berbère en Kabylie, où il avait vécu avec nos bienheureux confrères, assassinés à Tizi Ouzou le 27 décembre 1994 (Christian Chessel, Jean Chevillard, Alain Dieulangard et Charles Deckers). Il avait aussi appris le Bambara lorsqu’il avait été nommé à kolongotomo dans le diocèse de Ségou. Bien sûr, il maîtrisait le français et l’anglais ainsi que l’italien qu’il avait appris à Rome. Très adroit en technologie, il maitrisait à perfection l’outil l’informatique… Il s’intéressait à tout, et il était aussi féru d’Histoire.
Au plan physique, c’était un champion de la marche. Sa dernière marche pour se rendre Loumbila, représentait 55 kms, aller-retour ; sans parler de l’exploit, avec son ami Pawel Hulecki, en décembre passé : Ouagadougou-Boromo, soit 120 kms en 4 jours ! Il marchait tous les jours pour aller au Pélican et pour lui, c’était aussi un temps de prière…
C’est un homme manuel qui n’avait pas peur de se salir les mains ! Le jardin verdoyant et fleuri de la maison d’accueil est son œuvre ! En français, on dirait qu’il avait la main verte !!! D’ailleurs dans son nom, le mot verdure y figure.
Merci Darek. Les gens ne te connaissant pas et te voyant en tenue de travail, te prenait pour le jardinier, ce qu’il acceptait avec beaucoup d’humour. Dans tous les endroits où il a eu à travailler, il avait le souci de l’environnement, que ce soit en Algérie, au Mali, dans la maison de formation en Pologne et ici au Burkina Faso. C’était un homme proche de la nature, aimant les animaux, aussi bien domestiques que sauvages ; ses émissions préférées à la Télé étaient celles sur les animaux et sur l’environnement…
Au plan spirituel, c’était un homme discret dans l’expression de sa foi, mais on découvrait sa profondeur dans ses homélies ou les récollections communautaires… il était fidèle au chapelet du mois du rosaire et encourageait ses confrères à le rejoindre. Pour lui, s’occuper des plantes était une façon de prier et de louer le Seigneur.
Ce qu’il faut signaler ce soir, c’est sa fidélité à sa vocation missionnaire, libre et disponible pour accepter les différentes nominations qu’il a reçu tout au long de sa vie missionnaire. Un homme qui prend à cœur le travail qu’on lui confie. Il aimait son travail à l’économat, et il aimait ses élèves du Pélican. Son passage au Pélican laissera un grand souvenir, surtout dans le domaine de la discipline et de l’organisation…
Il pouvait avoir l’apparence d’un homme dur et fermé, mais il avait un tempérament plutôt ascétique, dur et exigeant avec lui-même. Darek était un homme de relations, très ouvert, respectueux du personnel, et surtout juste. En ville, il était connu des commerçants, des agences de voyages des services de l’administration. On se souvient de lui comme d’un homme aimable et plein d’humour. Une de ses dernières paroles, a été de prendre des nouvelles du « petit Joseph », notre stagiaire, qu’il savait lui aussi en mauvaise forme « comment va le petit Joseph, J’espère qu’il ne souffre pas trop ? » disait-il le vendredi 8 novembre.
Darek a vécu jusqu’au bout, son engagement à la pauvreté et à la simplicité pour le Royaume. Il a laissé dans sa chambre peu de choses pour lui-même : quelques habits et des chaussures… mais il laisse dans notre communauté et dans chacun de nos cœurs, un grand vide.
Nous croyons que son absence est pour nous une présence, d’une autre façon, parmi nous et qu’il va continuer à nous épauler, à nous aider d’une façon plus efficace que lorsqu’il était parmi nous physiquement.
Darek, repose en paix, salue pour nous, nos confrères Martyrs d’Algérie. Nous sommes convaincus que désormais tu feras communauté avec eux, comme autrefois à Tizi-Ouzou.
Que par la miséricorde de Dieu, l’âme de notre frère et ami Darek repose en paix ! AMEN
Au nom de communauté des missionnaires d’Afrique de la Maison d’Accueil à Ouagadougou.
Père Joseph Clochard